Vous qui me suivez depuis longtemps déjà, vous savez que je ne suis pas une grande créatrice.
Je veux dire par là que je pars quasiment systématiquement de patrons et modèles existants. Je change le coloris, j’allonge un peu les manches, je fais une ou deux petites modifications discrètes, mais globalement, je respecte à la lettre l’esprit du modèle. J’ai donc quasiment toujours une idée assez précise de ce que va donner mon tricot. Sauf surprise.
Ce pull a été riche en surprises. Une mauvaise, d’abord, puis une bonne. Cette fois, je n’avais absolument aucune idée de ce qui m’attendrait au bout du tricot!
L’histoire commence en novembre 2019.
J’étais partie sur un modèle avec des torsades et des points fantaisie, qui se tricotait en plusieurs parties, et m’a demandé pas mal de travail. J’étais vraiment très enthousiasmée par ce modèle, que je trouvais féminin, gracieux, travaillé et original. J’ai tricoté durant plusieurs semaines, motivée par le rendu que j’imaginais que mon pull aurait à la fin.
Une fois toutes les parties terminées, j’ai donc tout cousu, et essayé mon pull. Et là, catastrophe. C’était d’un seyant digne d’un éléphant portant un tutu. Je n’exagère pas. Les côtes placées sur les hanches accentuaient la proéminence osseuse dont je suis affublée à cet endroit, le col était affreux, pas vraiment bateau et inconfortable, et les différentes partis cousues entre elles manquaient de souplesse et d’élasticité au niveau des coutures.
J’étais assez proche du désespoir, je dois l’avouer. J’avais consacré un petit budget à cette douzaine de pelotes de mérinos, je m’étais donné du travail, j’avais beaucoup espéré porter mon pull chaud (dont ma garde-robe manquait), et un seul regard dans la glace avait suffi à me faire comprendre que le fruit de tant d’heures de travail était bon à jeter.
Cependant, j’aimais beaucoup le coloris de la laine, qui est de belle qualité, et il me paraissait impensable de jeter cette laine sans essayer autre chose.
J’ai donc, dans un premier temps, essayé d’arranger les choses, en m’imaginant retoucher le col, modifier la forme générale, etc. Mais plus j’avançais dans ma réflexion, plus il m’apparaissait indispensable de TOUT défaire pour récupérer la laine.
En soi, détricoter ne m’a jamais dérangée. Je suis assez perfectionniste, et je suis tout à fait capable défaire une trentaine de rangs pour corriger une erreur, ou de faire quatre échantillons différents jusqu’à être sûre de mon numéro d’aiguilles avant de commencer. Là où ça se complique, c’est quand il y a des coutures. Je DETESTE découdre un tricot. J’ai souvent du mal à identifier le fil qui m’a servi à coudre les différentes parties entre elles, et coupe régulièrement une maille du tricot à la place, ce qui provoque un trou, et, lorsque je remets en pelote le fil détricoté, je me retrouve avec des petits morceaux dont je ne pourrais plus rien faire.
Bref, la perspective de défaire ce tricot me mettait les nerfs en pelote.
J’ai malgré tout, ce fameux hiver 2019, commencé à découdre et détricoter ce fameux pull. Et puis, le printemps arrivant, découragée, je l’ai remisé dans un panier et me suis promis de le reprendre plus tard.
Un an , je m’y suis effectivement remise. Du temps avait passé, mon amertume et ma déception s’étaient un peu apaisées, j’ai donc envisagé plus sereinement ce détricotage, et m’en suis sortie avec moins de dommages et de peine que ce que j’avais redouté.
Une fois mon pull revenu à l’état de pelotes, il m’a donc fallu trouver un nouveau modèle à faire avec ce fil. J’ai beaucoup de catalogues et de modèles, et pourtant, j’ai eu bien du mal à projeter cette laine d’un rose assez vif sur un autre modèle que celui que j’avais si longtemps envisagé. Je voulais absolument un pull, et pas un gilet, et les modèles que je trouvais correspondant àl’épaisseur du fil ne me convenaient jamais. Finalement, j’ai jeté mon dévolu sur un pull à la forme très simple, dont l’aspect initial n’a rien à voir avec ma version: tricoté en fil double dont l’un est dégradé et l’autre duveteux, dans des tons très pastels, il fallait un gros effort d’imagination pour le voir en rose, dans un fil plutôt sec.
La version d’origine… … et la mienne.
Une fois mon choix arrêté sur le modèle, le tricot s’est ensuite enfin déroulé tranquillement. La forme est très simple, le point répétitif (côtes perlées), peu de diminutions et d’augmentations, bref, après la galère de la première version, c’était un long fleuve tranquille dont la traversée s’est faite en quelques semaines.
Je peux vous dire que je tremblais avant le premier essayage de cette seconde version, car en cas d’échec, je crois que j’aurais eu du mal à m’y remettre une troisième fois.
Heureusement, le pull fini ressemblait bien, cette fois, à ce que j’avais en tête. Un pull simple, qui illumine une tenue sobre, à porter avec une broche ou une paire de boucles d’oreilles fantaisie, et surtout, surtout, un pull chaud et couvrant!
Car mes lectrices fidèles n’auront sans doute pas manqué de le remarquer : il y a un changement de décor subtil mais bien réel sur les photos que je vous montre aujourd’hui! Eh oui, au milieu de cette aventure tricotesque, il y a eu un déménagement, LE déménagement, qui nous a vu enfin quitter notre appartement parisien bien isolé et réchauffé par son petit nuage de pollution, pour une grande et ancienne maison pleine de charme entourée d’un jardin, dont les fenêtres à simple vitrage « dans leur jus » assurent une aération naturelle des plus efficaces, et ce, même en plein coeur de l’hiver. Vous comprenez donc que les critères « chaud » et « couvrant » aient pris une importance capitale dans la confection de mon tricot! Et vous ne serez donc pas étonnées d’apprendre que mon nouveau pull a déjà été porté et reporté maintes et maintes fois, et apprécié à sa juste valeur. (Plus sérieusement, on a eu très froid cet hiver dans la maison, et les pannes de la vieille chaudière à fuel n’ont pas aidé. Je peux vous assurer que je me suis félicitée d’avoir mené ce tricot à terme juste au bon moment!)
Il n’est certes pas particulièrement amincissant, mais ça ne me gêne pas, et il passe sans problème sous un manteau. Je l’ai volontairement fait un peu plus court que ce que j’ai l’habitude de faire, car j’avais peur que, plus long, il ne soit pas flatteur et visuellement trop présent. Je suis très heureuse du choix de coloris, car j’avais un peu trop pris l’habitude de coudre et tricoter du foncé ces dernières années, et mon moral avait besoin d’ajouter de la couleur et de la gaieté dans ma garde-robe. je compte bien continuer sur cette voie, car enfiler un pull qui met de bonne humeur et donne bonne mine, ça vaut de l’or en ces temps de disette sociale et amicale! (Surtout qu’arriver dans une nouvelle ville et se faire de nouvelles connaissances en temps de pandémie, c’est pas simple!)
Bon, si je compte bien, depuis le début de ce blog, nous en sommes au quatrième parquet-moulure-cheminée. J’espère que mon fidèle lectorat apprécie le soin que je prends à assurer une continuité esthétique pour mes arrière-plans! Ceci dit, je suis bien tentée par des photos en extérieur avec un rien de verdure et d’hortensias pour les cousettes estivales, au risque de faire fuir mes lectrices devant une telle révolution photographique!
L’avis de Monsieur : Monsieur a cette fois été d’une efficacité, d’une clarté et d’une concision sans appel. Le premier porté de ce pull a été salué par un enthousiaste : « Superbe, ce pull! » Que demander de plus?!
(On m’a signalé dans les commentaires des articles précédents qu’il était scandaleux que je ne donne plus la parole à Monsieur. Devant une telle révolte, je rétablis donc un semblant de parité! Sachez seulement qu’au fil des années, il est devenu très difficile de recueillir une réaction totalement spontanée de la part du principal intéressé. Il sait que sa parole sera traquée et exposée sous les feux des projecteurs, du coup il devient méfiant et tourne sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler, ce qui donne des avis très tièdes et sans aucune saveur bloguesque!)
Fiche technique
- modèle : pull « Éléa », modèle n°29, catalogue Phildar n°190, automne/hiver 2020-2021
- fil utilisé : mérinos 6, coloris Pétunia, Phildar
- numéro d’aiguilles utilisé : 4,5 et 5
- niveau de tricot : « confirmé », selon le magazine. Je pense qu’il est pourtant accessible aux débutantes qui commencent à bien se débrouiller.
- modifications: aucune, sauf allonger légèrement les manches et un chouïa le corps
- points forts : super confortable, chaud, bien couvrant, facile à porter car très simple. Un basique.
- points faibles : les côtes perlées, ça monte lentement, même en 5!
24 Comments
Bravo Mathilde pour votre ténacité qui a payé ! Votre pull tout simple vous va à ravir, comme quoi parfois il ne faut pas rechercher la difficulté…vous le porterez ss doute plus facilement qu’un ouvrage trop travaillé. Je vous suis depuis le début de votre blog et apprécie bcp votre univers, je n’aime pas trop ce mot ms c’est pour résumer tt ce que je vois et lis de vous, je suis moi-même lorraine et depuis toutes ces années, c’est la première fois que je commente… bon courage pour ces qqs jours de froid qu’il ns reste à supporter (certes plus rien à voir avec la période très froide que nous avons eu), ms bientôt vs allez davantage profiter de votre jolie demeure et aussi de ses extérieurs que j’imagine bucoliques . Evelyne
Bonjour Evelyne,
Merci beaucoup pour ce premier commentaire, et pour votre lecture régulière!
Oui, il faut parfois faire preuve de ténacité pour arriver au résultat souhaité, même si parfois le découragement guette!
Nous avons eu froid cet hiver, mais cependant rien à voir avec les hivers lorrains de mon enfance… nostalgie nostalgie!!
A bientôt !
Tricoter et détricoter: le propre de toute tricoteuse… Personnellement, j’adore votre version du pull « Eléa »: sa couleur est pleine de peps. Cela fait des années que je vous suis, vos articles sont inspirant. Surtout n’hésitez pas à vous faire plaisir avec des photos en extérieur, ce plaisir se répercutera sur vos lecteurs(trices) :-).
C’est toujours un plaisir de savoir que le blog est suivi depuis longtemps : en écrivant les articles, j’ai l’impression de m’adresser à des « amies » et de reprendre le fil d’une discussion à bâtons rompus!
C’est noté pour les photos! J’essaierai de motiver Monsieur pour jouer au photographe…
Quelle persévérance ! Je me sens concernée parce que j’ai un petit tas de « tricots à détricoter », mais « la flemme » étant mon deuxième prénom … Bref.
Ton pull est parfait dans cette version, et le rose est parfait ! Juste une question, il ne s’est pas trop allongé une fois lavé ? J’ai eu des mésaventures avec le mérinos Phildar, qui a transformé un joli bonnet à torsades en sac à provisions (à torsades), du coup je n’ose plus le tricoter 🙁
Ah et pour rebondir sur ta remarque en début d’article, je trouve qu’en tricot (ou mode) comme en musique, il existe des créateurs et des interprètes – qui permettent de faire vivre les créations 🙂
PS : j’ai les nerfs solides, je pense pouvoir encaisser le choc d’un fond photo différent malgré les années de parquets et moulures au plafond ;D
Détricoter, c’est jamais amusant… J’ai aussi quelques pulls et gilets que je ne mets plus, mais que je ne veux pas donner car la laine est belle, et que je devrais détricoter. Donc ne t’inquiète pas, moi aussi je suis flemmarde du détricotage!
Concernant celui-ci, non, il ne s’est pas déformé au lavage… Ni celui en mérinos 3,5 que j’avais tricoté… Je comprends que tu sois réticente à renouveler l’expérience!
Et, oui, effectivement, je me sens davantage interprète que créatrice! Ta comparaison avec l’univers musical flatte mon ego!
Et c’est noté pour les photos, j’irai tout de même mollo pour ménager mon public!! 😀
Ce pull te va très bien je trouve! Et oui quand ça convient pas et qu’on y a passé du temps c’est bien énervant! Allez zou ton bel article me donne envie d’aller de ce pas détricoter tous mes ratés et mes jefiniraisunjour qui dorment trop inutilement dans l’atelier!!! Et hop reprendre aussi la motivation de terminer un gilet en cours pour la grande avec un beau détricot de laine bleue de mon premier tricot (un chouette modèle mais quasi importable un truc modulable mais peu pratique à l’usage mais quelle nostalgie de le détricoter avec toute sa symbolique!). Oui cette période est étrange pour rencontrer de nouvelles personnes… Allez le printemps arrive!
Oooh que je comprends cette nostalgie du premier tricot! Je suis bien d’accord, un tricot, on met du temps à le réaliser, on vit plein de choses en parallèle, qui lui resteront lié. C’est le cas notamment pour les deux gilets que je m’étais tricoté durant mes grossesses. Lorsque je les porte, je revis un peu ces périodes! Alors c’est super que tu redonnes vie à ce beau bleu!
Et oui, vive le printemps qui va alléger un peu cette ambiance pesante, même si on ne sera pas encore sortis de l’auberge…
Bravo ! cette deuxième version est beaucoup mieux que la première. Tu as bien fait de persévérer.
chapeau pour avoir tout recommencé, ça valait le coup !
Merci!! J’ai failli abandonner plusieurs fois, tout comme celui que je suis en train de faire et que je tricote et détricote inlassablement! Désespoir… Mais je ne le lâcherai pas!
Très joli pull et le choix du prénom qui lui a été associé! 😉 Bravo
C’est toujours un plaisir de lire les nouveaux billets de ton blog, le seul que je continue à suivre et à lire depuis ses débuts!!!
Bonjour Lucile,
Merci beaucoup pour ton gentil commentaire! Je suis très flattée de cette belle fidélité, malgré mon manque de régularité dans la tenue de ce blog…
A bientôt!
Dommage, on aurait aimé voir une photo portée de la première version du pull ! J’admire néanmoins le fait d’avoir tout détricoté ! Mais c’est vrai que c’est un budget, alors c’était une bonne initiative ! Bravo !
Super le nouveau coin photo ! 😉
Mais oui, tu as raison, j’aurais dû me prendre en photo avec, ça aurait été plus parlant. Mais sur le coup, je pensais pouvoir récupérer un peu le modèle premier en modifiant notamment la forme du col. Mais s’il y a une prochaine fois de ce genre, c’est une bonne idée, j’essaierai de penser à photographier avant de détricoter.
Un joli pull tout simple et plein de peps ! Le motif est certes plus classique que le premier modèle envisagé, mais la couleur est telle qu’il donne tout de suite une allure à la tenue la plus simple ! Tu as bien fait de donner une seconde vie à cette belle laine, elle a l’air douillette à souhait !
Merci beaucoup, Milène! 🙂
Merci de ton partage! J’aime beaucoup ton pull et sa couleur; le voir porté, donne envie de le tricoter pour soi.
Merci beaucoup! ☺️
Fidèle lectrice depuis des années, c’est la première fois que je prends la parole ici. Tes articles sont toujours un plaisir à lire et quel plaisir de voir l’avis de monsieur revenir!
Le pull est superbe, cela valait le coup de le refaire. Pour mettre des mois à faire et refaire plusieurs fois un pull (notamment car je suis de plus en plus sûre de ce qui me va morphologiquement parlant et que je modifie toujours beaucoup les patrons), je trouve que les pulls que j’ai le plus sué à faire sont ceux qui me plaisent le plus à l’arrivée.
J’ai également les nerfs solides et me réjouis d’avance de voir un futur fond photo jardinesque!
Bonjour Jeanine,
Je suis ravie de ce premier commentaire, et j’espère qu’il ne sera pas le dernier! Je constate la même chose que toi : les pulls sur lesquels j’ai passé le plus de temps sont finalement ceux qui me vont le mieux et dont je suis la plus satisfaite. C’est la raison pour laquelle je ne m’avoue jamais vaincue même après douze détricotages!
Et oui, des photos un peu différentes arrivent bientôt!
En tant que lectrice irrégulière mais assidue, j’apprécie cette continuité dans le parquet. 🙂
Merci pour ce partage, tes articles sont toujours un plaisir à lire et tes réalisations superbes.
Bravo pour le déménagement, la maison a l’air d’avoir un charme fou.
Je te souhaite plein de bons moments dans ton nouvel écrin.
A défaut d’assurer une régularité dans mes articles, j’assure au moins celle du décor!!
La maison a effectivement énormément de charme, mais aussi beaucoup de défaut – le principal étant de ne pas être entretenue par ses propriétaires, ce qui nous vaut régulièrement de gros ennuis pesant lourd sur notre quotidien. Mais vivre dedans est malgré tout un immense privilège!
Bonjour Mathilde, je t’ai adressé une demande d’accès à ton compte Instagram. Curieuse de voir si tu publies là-bas.
Bonjour Clémentine,
Peux-tu me donner le nom de ton compte/pseudo sur instagram? Ou me laisser un message via la messagerie de cette appli? Je publie dessus, oui, de façon irrégulière : très active à certaines périodes, et durant plusieurs semaines ensuite je me déconnecte et fais une pause.